15 octobre 2014

Marcher pour Gaza

Des extraits de ce texte de Christian Nadeau ont été lus à la manifestation pour Gaza qui s’est tenue à Montréal le 10 août dernier.

Depuis un mois, le gouvernement d’Israël bombarde la bande de Gaza en invoquant son droit de se défendre.

Israël prétend rétablir la paix et l’ordre. Or, que peut bien valoir cette paix si elle signe l’acte d’une guerre perpétuelle ? Que peut valoir cette paix si elle proclame l’écrasement d’un peuple ? Que peut bien offrir cet ordre, sinon la dépossession, le malheur et la colère ?

Israël prétend être dans son droit. Or, que peut valoir un droit sans justice ? Personne n’est dupe. Il ne s’agit pas de droit. Il s’agit de pure et simple force. Il s’agit de destruction.

Comment fermer les yeux sur les centaines et les centaines de morts, emportés par cette folie meurtrière qui redouble jour après jour ? Comment cautionner un tel aveuglement sans nous conspuer nous-mêmes ? Nous ne connaissons pas la terreur et la furie. Mais nous sommes ce qu’ils sont, nous sommes ce qu’elles sont, des femmes et des hommes avec la volonté de vivre.

La paix, la liberté, la dignité, l’égalité ne sont pas des vains mots. Si nous ne pouvons leur donner toute leur importance maintenant, à l’heure où meurent par centaines les femmes et les hommes de Gaza, ces termes se videront de leur sens et prendront de nouvelles significations. Ils envelopperont de mensonges les injures, les blessures et les meurtres, augmentant ainsi la longue liste des brimades ; ils deviendront les masques sournois et railleurs des plus violentes iniquités. Si les mots de liberté et de justice possèdent encore un sens, nous devons les parler. Ne les laissons pas en pâture aux vautours.

Contre cette démence, contre cette fureur, il faut une longue chaine humaine dont chaque maillon donne à l’autre une force dont il ne se croyait plus capable.

Il faut un pont, capable de traverser les fausses frontières et de surmonter les haines, orchestrées par les intérêts des puissants. Un tel pont, fait du souffle de nos cris et de nos chants, ira jusqu’à Gaza.

Il faut un mur façonné de nos vies, de nos peines et de nos amours, un mur dont chacun, chacune d’entre nous serait tantôt la brique tantôt le ciment, un mur contraire à tous les murs de sévices et d’insultes, à toutes les forteresses de la ségrégation et du racisme. Un mur qui soutiendra notre humanité, et non un mur qui la divise, l’écrase et la brise.

Il faut un toit pour protéger, un toit solide comme l’affection que se portent les vrais amis.

Il faut une grande maison pleine de fenêtres pour expulser l’obscurité de la mort et du bruit, un édifice ouvert à la lumière pour chasser les cauchemars trop réels des bombes et du sang. Il faut une maison, pour reprendre les mots du poète Mahmoud Darwich, belle « comme la rencontre du rêve et de l’éveil, comme le soleil qui, dans les habits de l’orange s’en va à la mer ».

Contre ce délire de fer et de feu, il faut une immense clameur, capable de parler plus fort que les armes et d’enrayer la guerre, ne fut-ce que pour dire à Gaza que nous ne l’abandonnons pas. Cette clameur, ce sera notre marche pour la justice, notre marche pour la paix, notre marche pour Gaza.

Offrons à Gaza ce qui nous appartient en propre, ce que nul ne peut nous nier, fut-il accoutré des artifices de nos gouvernements. Donnons au peuple de Gaza notre solidarité. Offrons-lui notre amitié. Marchons pour Gaza comme si nous pouvions serrer ses enfants dans nos bras. Marchons pour Gaza comme si nous pouvions ouvrir ses portes, comme si nous pouvions éteindre tous les brasiers.

Le 10 août, rassemblons-nous. Le 10 août, répondons toutes et tous à l’appel pour la paix et la justice.

Ni trop peu, ni trop tard. Ce sont les boniments de nos fausses excuses.

Refusons de baisser les bras car Gaza n’a pas besoin de notre lassitude. Refusons de désespérer car Gaza n’a que faire de notre accablement.

Les gens de Gaza ne veulent pas de nos éclipses ; ils veulent eux aussi le soleil.

Christian Nadeau

Merci à l’auteur pour son aimable autorisation à la diffusion du texte ici.

Source : http://www.pressegauche.org/spip.php?article18485

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